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Adélard Godbout

La loi des relations ouvrières

La crise de la conscription de 1942




Adélard Godbout (1892-1956)


En juin 1936, le premier ministre Taschereau démissionne après les scandales révélés par l’enquête des comptes publics et les attaques répétées de Maurice Duplessis, chef de l’opposition. C’est le ministre de l’Agriculture, Adélard Godbout, qui lui succède. Aux élections du mois d’août 1936, l’Union nationale dirigée par Maurice Duplessis prend le pouvoir. En effet, ce dernier réussit à manoeuvrer pour satisfaire les éléments conservateurs de son parti tout en s’assurant l’appui des progressistes de l’Action nationale. En octobre 1939, les libéraux reprennent le pouvoir avec la promesse que le gouvernement d’Ottawa ne décrétera jamais de conscription tant qu’ils formeront le gouvernement. Cette promesse fait élire Godbout, mais causera également sa perte aux élections suivantes.


Godbout est essentiellement un réformiste et entre en action au printemps de 1940 en proposant le suffrage féminin, ce qui est fortement dénoncé par l’Église en particulier par le cardinal Villeneuve. L’Église se prononce contre le vote féminin parce qu’il va à l’encontre de la hiérarchie familiale et que son exercice expose les femmes «aux passions et à l’aventure électoraliste». Godbout se voyant attaquer de toutes parts décide de porter un grand coup en menaçant de démissionner et de laisser la place à l’anticlérical Télesphore Bouchard. Rapidement, les protestations de l’Église disparaissent et la loi est finalement votée. Le Québec était la seule province du Canada à ne pas reconnaître le suffrage féminin.


En mai 1943,il force l’adoption de la loi sur la fréquentation scolaire obligatoire. Elle rend celle-ci obligatoire pour les enfants de 6 à 14 ans. Cette loi reçoit l’appui des syndicats, de la Ligue des droits de la femme et de plusieurs chambres de commerce. En effet, les patrons désirent une main-d’oeuvre instruite et bien formée. Ainsi, on vient à bout de l’opposition du clergé qui défend le principe de l’école privée.


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La loi des relations ouvrières


En février 1944, le gouvernement d’Adélard Godbout fait adopter la loi sur les relations du travail. Elle oblige l’employeur à négocier de bonne foi avec un syndicat formé à 60% et plus de travailleurs. Ce syndicat est de plus autorisé à représenter tous les employés de cette unité de production. Le gouvernement du Québec fait adopter cette loi pour prévenir un décret fédéral dans un champ de compétence provinciale. La loi provinciale prévoit l’accréditation d’un syndicat par un organisme, la Commission des relations du travail, et oblige l’employeur à négocier de bonne foi. La grève est également interdite pendant la durée de la convention collective. Le gouvernement fait également voter l’institution d’une Commission du salaire minimum.


Une autre décision importante cause plus de problèmes au gouvernement libéral. En effet, il permet un amendement constitutionnel qui autorise Ottawa à édicter des lois dans le domaine de l’assurance-chômage. Mackenzie-King est prêt à légiférer même s’il doit affronter le refus de quelques provinces. Godbout se sent coincé entre les forces ouvrières qui approuvent le projet et les nationalistes qui sont résolument contre. En fin de compte, l’amendement constitutionnel est approuvé par Londres à la satisfaction du monde du travail.


En avril 1944, c’est l’adoption de la loi 17 qui permet la création de la Commission hydroélectrique du Québec. Cette dernière est une société d’État dont le mandat consiste à fournir l’énergie aux municipalités, aux entreprises industrielles et aux citoyens au taux le plus bas compatible avec une saine administration financière. La création de l’Hydro-Québec et l’annonce de l’étatisation font suite à plusieurs années de débat. En même temps, on annonce l’étatisation de la Montreal Light, Heat and Power co.

En somme, l’administration Godbout est un modèle d’innovations et de bonne gestion. Un effort a été fait pour diminuer le patronage au grand dam des organisations locales. Mais ce qui causa la perte de Godbout c'est la crise de la conscription.


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La crise de la conscription de 1942


En août 1939, Godbout déclare : « Je m’engage sur l’honneur à quitter mon parti et même à le combattre si un seul Canadien français est mobilisé contre son gré, sous un régime libéral...» Le gouvernement fédéral adopte en premier lieu la loi pour la mobilisation pour service au Canada. Cette mesure n'est pas considérée comme un pas vers la conscription. Cependant, les nationalistes s’éloignent de Godbout. Ce dernier croit toujours en un Canada bilingue d’un océan à l’autre


Pour sortir de sa promesse de ne pas faire de conscription, Mackenzie King décide d’organiser un référendum lui permettant de se dégager de toute obligation résultant d’engagement du passé. Pour s’opposer à ce plébiscite, les nationalistes québécois organisent la Ligue pour la défense du Canada. Cette nouvelle association fait des assemblées à travers le Québec.


À Québec, René Chaloult dépose une motion dans laquelle il demande aux Québécois un vote négatif face au référendum. Les libéraux provinciaux sont ennuyés par ce problème. Adélard Godbout et quelques ministres croient à la nécessité de l’effort de guerre. Toutefois, plusieurs députés se rebellent. Godbout sent ses troupes divisées.


Mackenzie-King est manipulateur et sait comment s’y prendre pour parvenir à son but ultime : la conscription. Le 27 avril 1942, les résultats du plébiscite sont proclamés. Le Québec vote non à 71%. Mais en examinant de plus près les résultats, on peut constater que les Canadiens français ont voté non à 85%, pendant que le oui l’emporte à 80% dans l’ensemble du Canada. Chez les francophones, il y a une unanimité comme on a rarement observée. Dans les villes comme dans les campagnes, chez les ouvriers comme chez les bourgeois, partout il y a une prise de conscience. Une unité politique est atteinte, en ce sens que les libéraux comme les conservateurs et les nationalistes, tout le monde se rejoint. Une pareille unité se retrouve chez les anglophones, mais pour les raisons contraires.C’est donc un vote de «race». Ni le haut clergé, ni les hommes politiques en place ne font changer d’idée au peuple. On assiste ici à quelque chose de viscéral. Le oui l’emporte très majoritairement au Canada et comme chaque fois où des cas similaires se sont présentés, la majorité anglophone impose sa volonté. Godbout est battu aux élections suivantes, en 1944. Cependant, il reste chef de l’opposition à Québec jusqu’en 1948.


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