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Daniel Johnson et le retour de l'Union Nationale



Daniel Johnson (1915-1968)


Daniel Johnson est né à Danville dans les Cantons de l’Est. Après des études classiques au séminaire de Saint-Hyacinthe, il fait des études en droit à l’Université de Montréal. Chef de file à l’université, il est recruté par l’Union nationale. Il se fait élire comme député de Bagot à l’élection partielle du 18 décembre 1946. Il sera ministre des Ressources hydrauliques dans les cabinets de Duplessis, Sauvé et Barette du 30 avril 1958 au 5 juillet 1960.


Daniel Johnson devient chef de l’Union nationale le 23 septembre 1961 et automatiquement Chef de l’opposition officielle. Rapidement, Johnson prend le contrôle du parti en s’assurant d’avoir la main haute sur ses finances. En peu de temps, il s’aperçoit que la supposée richesse du parti est beaucoup plus mythique que réelle.


Aux élections de 1962, Johnson s’oppose dans un premier temps à la nationalisation de l’électricité. L’Union nationale est débordée par la nouvelle ferveur nationaliste qui secoue le Québec tout entier. De plus, dans un célèbre débat télévisé, Jean Lesage a facilement le dessus sur Johnson qui a malheureusement négligé de se préparer adéquatement. La défaite force l’Union nationale à réfléchir sur un programme politique plus adapté au nouveau contexte politique.


À l’Assemblée législative, Johnson a vite fait de reprendre l’initiative en soulignant la mésentente qui commence à s’installer au Parti libéral. C’est cependant dans le domaine constitutionnel qu’il manifeste une plus grande vivacité. Du simple statut particulier, il en vient rapidement au concept de l’égalité dans un Canada à deux nations. C’est ainsi que prend corps le thème d’un court essai: Égalité ou indépendance qui va marquer sa démarche constitutionnelle.


Il entraîne son parti dans une lutte sans merci à la formule Fulton-Favreau proposée par le gouvernement Lesage, où nous serions une province contre dix. Johnson incite fortement les membres du Conseil législatif, majoritairement unioniste, à voter contre. Il récupère ainsi le vote nationaliste qui lui avait échappé aux élections précédentes. Tout est en place pour une victoire électorale aux prochaines élections.


Aux élections de 1966, l’Union nationale, avec 41% des suffrages, recueille 56 des 108 sièges. Dès le début de son gouvernement, Johnson doit s’expliquer sur «l’Égalité ou l’Indépendance». À ce sujet, il déclare à Radio-Canada :«Si jamais le Québec vient à se séparer du Canada, c’est parce que nous y aurons été forcés ». En réalité, Johnson veut en arriver à un nouvel arrangement constitutionnel.


L’administration quotidienne l’oblige à délaisser les enjeux constitutionnels, car il doit régler une grève dans les hôpitaux. Par décret, il nomme un administrateur, Yves Pratte, qui signe les conventions au nom des hôpitaux du Québec. Johnson poursuit la Révolution tranquille en instituant les CÉGEPS ainsi que l’Université du Québec.


Pour promouvoir la politique internationale du Québec, il accepte une invitation du gouvernement français et se rend à Paris en visite officielle du 17 au 21mai 1967. Une symbiose s’installe entre le premier ministre Johnson et le général de Gaule. Johnson le met au courant de la politique canadienne et de son intention de faire changer sa constitution. Le général reçoit une invitation pour une visite officielle à l’occasion de l’Expo de 1967. D’abord hésitant, le général se laisse finalement convaincre de venir en visite officielle au Québec et au Canada. Cette visite devient un événement historique qui marquera à jamais l’histoire du Québec.


Puisque le général est l’invité du Québec, il doit arriver au Québec. La décision est finalement prise de venir à Québec à bord du Colbert et de débarquer à l’Anse aux Foulons. Une fois les salutations d’usage envers le gouvernement fédéral faites, la visite proprement québécoise du général peut commencer. Le gouvernement du Québec a pensé à un long défilé entre Québec et Montréal. On fera donc le voyage en auto tout au long du Chemin du Roy. De village en village, l’accueil est triomphal. Partout on peut entendre «Vive de Gaule», «Vive le Québec». Mais c’est finalement à Montréal, du haut du balcon de l’Hôtel de Ville que de Gaule lance son «Vive le Québec libre». Le Québec vient de faire une entrée fracassante sur la scène internationale.


Plus tard, la tempête continue en sol canadien sur les paroles du général. En séjour de repos à Hawaï, Daniel Johnson se sent obligé de faire une mise au point. Il y déclare : «Nous allons tout mettre en oeuvre pour obtenir une constitution canadienne qui fera en sorte que tout citoyen qu’il soit d’origine française ou anglaise ou d'une autre origine ethnique se sente chez lui partout au Canada». Il affronte Pierre Elliot Trudeau sur ce sujet à la conférence constitutionnelle qui a lieu à Ottawa du 5 au 7 février 1968. Quelque temps après, Johnson ajoutera :«C’est seulement au Québec que les Canadiens français ont la force politique que confère la prépondérance numérique. C’est là qu’ils pourront se donner des institutions, un cadre de vie, un milieu qui soient à la dimension exacte de leurs besoins et de leur personnalité».


Le Québec est en ébullition. Du 11 au 14 octobre, se tient à Québec le congrès de fondation du Parti québécois dont René Lévesque devient le chef. Malheureusement, Johnson décède au barrage Manic 5, le 26 septembre 1968. Il a contribué largement, à sa façon, à compléter la Révolution tranquille et à remettre en force la notion de nationalisme. Son successeur, Jean-Jacques Bertrand, qui n’a pas son instinct politique aiguise le nationalisme en faisant voter le projet de loi 63. Cette loi assure aux parents le libre choix de la langue d’enseignement, ce qui est perçu comme un recul par les nationalistes.


L’Expo 67 et l’ouverture du Québec au monde


En 1967, Montréal est l’hôte d’un événement qui n’arrive généralement qu’une seule fois dans l’histoire d’une ville, une exposition universelle. 35 pays participent à l’exposition qui recevra plus de 50 millions de visiteurs. Les Québécois venant à peine de s’émanciper avec la Révolution tranquille vont s’associer massivement à cet évènement.


À cette occasion, les Québécois entrent définitivement dans la modernité. En s’ouvrant au monde, le Québec trouve sa propre identité. C’est un sentiment de fierté nationale qui apparaît avec cette manifestation d'envergure. Le Québec s’affranchit d'un passé basé sur la tradition et l’Église catholique pour se tourner vers une identité qui s’appuie davantage sur des valeurs nouvelles : la raison, la modernité, l’État.


Il est évident que l’un des temps forts de cet événement est la visite du général de Gaule et son discours du 24 juillet du balcon de l’Hôtel de Ville. Les Québécois sont prêts à entendre les paroles du général, mais lorsque le moment du choix viendra il y aura une hésitation et une remise en cause. Le Québec s’est émancipé à bien des égards, mais sa peur atavique de faire le pas décisif vers l’indépendance, fait encore partie de ses gènes. Il reste aux Québécois à se libérer totalement de sa crainte ancestrale du pas en avant.


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