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Le retour de Papineau et la fin d'une époque


L'idée d'une confédération


Un changement de garde vient de se produire. LaFontaine s’est substitué à Papineau comme chef politique des Canadiens français. Plusieurs personnalités demandent une amnistie générale y compris pour Papineau. Julie Papineau rentre au Canada avec deux de ses enfants. Amédée gagne Montréal en passant par Saint-Jean. On incite Papineau à revenir au Canada et à demander une amnistie.

Montréal devient la capitale du pays et l’assemblée s’installe tant bien que mal au marché Sainte-Anne réaménagé à cette fin. Amédée, devenu protonotaire au Palais de justice, fait vivre sa mère et ses frères. À la session de 1844, LaFontaine, chef de l’opposition, propose l’envoi d’une adresse à la reine demandant l’amnistie pour les délits politiques commis durant les insurrections de 1837 et 1838. Les 38 rapatriés de l’Australie s’embarquent pour le retour vers le Canada en novembre de la même année. L’abbé Chartier toujours en exil aux États-Unis rentre à son tour au Canada. Il ne manque que le retour de Papineau, ce qui ne saurait tarder.


Les députés canadiens-français se tiennent autour de LaFontaine, nouveau leader du groupe francophone. Papineau se décide enfin à rentrer au Canada. À la fin septembre 1844, il est de retour au Canada. Il a vieilli, mais n’a pas changé et a conservé son tempérament de fer. Il ne désire pas une rentrée politique, du moins dans l’immédiat. Il reçoit un montant appréciable d’argent qui représente le traitement intouché durant les années de crise. Il décide de retourner dans sa seigneurie pour assurer son développement. Il s’y fait construire un luxueux manoir. Les réformistes remportent facilement les élections et reçoivent l’appui de Papineau. Le ministère LaFontaine-Baldwin est formé et le principe de la responsabilité ministérielle est définitivement reconnu.


Papineau hésite à se présenter sous la bannière des réformistes dont le chef incontesté est LaFontaine, son ancien lieutenant. Il se décide finalement pour le comté de Saint-Maurice où il est élu le 24 janvier 1848. À la session qui s’ouvre en février 1848, Papineau est toujours reconnu comme un grand tribun, mais il n’est plus entouré par des disciples. Il est un parmi le parterre des députés. Malgré les reproches de Papineau, LaFontaine fait voter les subsides.


Le Dr Nelson, héros de Saint-Denis et nouvellement élu député, s’oppose avec violence verbale à Papineau à qui il continue à reprocher sa lâcheté pour avoir abandonné les patriotes au moment de la grande bataille. Pour plusieurs dont le journal L’Avenir, Nelson reproche à Papineau d’avoir fui à Saint-Denis alors qu’il est prouvé qu’il ne l’a fait que sur les conseils de Nelson lui-même. Papineau se sent de plus en plus isolé en Chambre. Il n’a plus aucun disciple. En plus, il s’oppose à LaFontaine à qui il fait reproche d’avoir participé au gouvernement de 1842 en trahissant ainsi les patriotes dont il faisait jadis parti.


Le gouvernement propose d’indemniser ceux qui ont été les victimes durant les insurrections de 1837-1838. Une telle mesure avait été prise pour le Haut-Canada, mais quand il est question d’appliquer la même mesure pour les habitants du Bas-Canada cela provoque une levée de boucliers chez les Britanniques. Les spectateurs dans les galeries de la Chambre protestent, vocifèrent et montrent bruyamment leur mécontentement. Lord Elgin qui vient lire l’adresse à l’ouverture du parlement reçoit des oeufs pourris lancés par la populace anglophone en colère. Le feu est mis au parlement. Les émeutiers s’en prennent même aux résidences privées des chefs réformistes. On décide alors de changer de capitale en faisant l’alternance entre Toronto et Québec, où le climat politique est plus calme. Papineau continue toujours de réclamer un Conseil législatif élu. Cependant, d’autres préoccupations viennent le tourmenter avec le projet d’abolir la tenure seigneuriale, dernier important vestige de la Nouvelle-France. En effet, de cette manière on s’attaque directement à Papineau, fier seigneur de la Petite-Nation. Il réclame l’égalité politique, mais s’oppose à l’égalité sociale.Il doit surtout vivre des difficultés financières occasionnées par la construction de son luxueux manoir. Presque toute sa vie, il aura de sérieux problèmes financiers. Papineau s’occupe activement du développement de son domaine. Il y a, en 1851, plus de 471 cultivateurs, 317 manoeuvres, 47 draveurs, un médecin, un notaire, etc. Une nouvelle session s’ouvre en mai 1851 où LaFontaine et son gouvernement proposent la construction d’un chemin de fer reliant Québec à Halifax. Un rapport est déposé sur l’abolition du régime seigneurial et le rachat par le gouvernement des droits seigneuriaux, projet auquel s’oppose toujours fortement Papineau. LaFontaine, comme suite à la démission de Baldwin, décide également de prendre sa retraite.


Lord Elgin dissout le Parlement, le 6 novembre 1851, et convoque de nouvelles élections. Papineau qui défend les droits seigneuriaux avec passion ne peut représenter un comté agricole où l’abolition de la tenure seigneuriale est bienvenue. Il décide de se présenter à Montréal. Il a, cependant, un homme politique important contre lui : John Young, un nouveau ministre. Papineau n’a pas le temps de faire campagne et est finalement battu. Il se retire à la Petie-Nation où il ronge son frein. Plus tard, on lui propose de se présenter dans le comté des Deux-Montagnes où il est élu député le 9 juillet 1852. Il se rend à Québec pour la session qui est convoquée pour le 19 août 1852. Une foule compacte l’accueille comme dans le bon vieux temps. Les amis de Papineau souhaitent vainement qu’il soit élu à nouveau président de la Chambre. Deux grandes questions tiennent la Chambre occupée : les réserves du clergé dans le Haut-Canada et la tenure seigneuriale dans le Bas-Canada. Papineau a perdu toute influence, le coeur n’y est plus. À 68 ans, il décide de renoncer définitivement à la vie publique. La page est tournée, mais le tribun continuera pendant encore longtemps d’exercer un magnétisme chez les Canadiens français.


En 1854, deux réformes sont adoptées : la sécularisation des réserves du clergé et l’abolition de la tenure seigneuriale. Une cour spéciale, dite Cour seigneuriale, déterminera les indemnités à verser à chaque seigneur aux dépens du Trésor public et d’une autre partie payable par les censitaires. La Cour seigneuriale continue à siéger pour établir le montant des indemnités que l’on versera aux seigneurs.Avec la compensation qu’il doit recevoir, Papineau compte bâtir un village modèle qu’il veut appeler Montebello, en l’honneur d’un ami français, le duc de Montebello, fils d’un général de Napoléon. Son épouse, Julie, s’effraie devant l’engagement des dépenses. Mais Papineau fait débuter les travaux avant d’avoir reçu les indemnités


Devant les difficultés pour le gouvernement de l’Union à se maintenir en place avec le principe de la double majorité, John Macdonald, premier ministre de l’Union, ne voit pas la nécessité de changer de régime politique. Le gouvernement Macdonald-Cartier perd la confiance de la Chambre après huit mois seulement. À l’automne 1858, Cartier, premier ministre, se rend à Londres pour demander au gouvernement impérial de l’aide pour la construction d’un chemin de fer intercolonial. Les élus canadiens constatent que l’Angleterre a perdu tout intérêt pour le Canada.On devra apprendre à se débrouiller sans la mère patrie.


Papineau se plaint toujours du manque d’argent. Cela ne l'empêche pas de mener un grand train de vie avec de nombreux domestiques à Montebello et leur maison de Montréal. Julie Papineau meurt subitement le 18 août 1862. Elle est suivie par son fils Lactance, qui décède à son tour en fin de la même année.


Le gouvernement Macdonald doit lutter contre les pressions nombreuses pour un système représentatif proportionnel à la population (Rep by pop) maintenant que le Haut-Canda est plus populeux que le Bas-Canada.


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L’idée d’une Confédération


Déjà Honoré Mercier lutte contre la proposition de George Brown qui fait la promotion de la représentation proportionnelle, ce qui aboutirait à la domination du Haut-Canada. George Brown propose contre toute attente la formation d’un comité qui étudierait les solutions pour chercher un remède aux frictions entre le Haut et le Bas-Canada. L’idée d’un gouvernement de type fédéral refait surface de plus en plus souvent. Finalement, c’est Macdonal d'abord opposé à un gouvernement fédéral qui va prendre la relève et mènera le projet à terme. Les provinces maritimes doivent se réunir à Charlottetown pour étudier le projet d’une union de ces provinces. Le gouvernement canadien fait une demande pour se joindre à eux, ce qui est finalement accepté. En septembre 1864, les délégués des provinces adoptent le principe d’une union fédérale des provinces. On doit se réunir à nouveau à Québec en octobre.


En janvier 1865, le projet d’une fédération est présenté à la Chambre par le gouvernement Macdonald. L’opposition est vive parmi la population canadienne-française. Papineau signe une requête s’opposant à la confédération dans laquelle il retrouve les mêmes défauts que dans l’Union. Plusieurs Canadiens français craignent que leur religion ne soit pas suffisamment protégée dans ce type de gouvernement. Néanmoins, Cartier défend fortement le projet. Macdonald en devient le père putatif.


Un premier problème sur l’éducation indique la place secondaire qu’occuperont les Canadiens français dans le nouveau gouvernement. L’éducation devant relever des gouvernements provinciaux, Galt, ministre important du gouvernement Macdonald, fait présenter par un ministre canadien-français, Hector Langevin, un bill accordant aux protestants de la future province de Québec le contrôle absolu de leurs écoles. Une pétition demande que le même traitement soit accordé aux catholiques du Haut-Canada.Galt et ses amis s’y opposent fermement. D'ailleurs, celui-ci prend un moyen détourné pour parvenir à ses fins. En effet, devant la levée de boucliers, le bill Langevin est retiré, mais il sera rétabli discrètement lorsque la loi sera adoptée par le Parlement de Londres. Avec le temps, le clergé appuie la nouvelle confédération qui suscite l’indifférence dans la population. C’est ce qui permet au gouvernement Macdonald d’aller de l’avant et de parvenir à ses fins sans trop de difficulté.


Le bill constituant une confédération de quatre provinces, la Nouvelle-Écosse, le Nouveau-Brunswick, le Québec et l’Ontario reçoit la sanction royale le 29 mars 1867 et doit entrer en vigueur le 1er juillet 1867. C’est Macdonald qui devient premier ministre avec Georges-Étienne Cartier comme premier lieutenant. Le 17 décembre 1867, Papineau fait sa dernière apparition en public. Il prononce un discours devant l’Institut canadien. Il y fait un réquisitoire contre la nouvelle confédération. Il souhaite finalement que « notre patrie n’aura de force et de grandeur, de prospérité, de paix permanente qu’en autant que toutes ces divergences d’origines et de croyances s’harmonisent et concourent ensemble et simultanément au développement des forces et de toutes les ressources sociales»


Pendant que Cartier continue à travailler ardemment à l’expansion du Canada par l’Ouest, la santé de Papineau se détériore rapidement. En septembre 1872, Papineau prend froid en faisant visiter son domaine à un visiteur français. Il refuse les derniers sacrements. Son enterrement va causer un problème puisqu’il ne croit pas, surtout en l’Église.Il compte sur la miséricorde de son Créateur. Le 23 septembre il décède. Il ne reçoit pas la sépulture ecclésiastique. Son corps est déposé dans la chapelle funéraire de la famille. Le plus grand homme politique canadien-français s’éteint. Il a participé grandement à l’affirmation débutante de la nation québécoise


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